Qu’est-ce que le taoïsme? (partie 1 de 2): Introduction
Description: Les origines du taoïsme et les raisons de son développement.
- par Aisha Stacey (© 2015 IslamReligion.com)
- Publié le 23 Nov 2015
- Dernière mise à jour le 23 Nov 2015
- imprimés: 21
- Lus: 20,246
- Évalué par: 0
- Envoyés: 0
- Commentés: 0
Le taoïsme est une ancienne tradition philosophique chinoise et croyance religieuse aussi appelée daoïsme (terme qui se rapprocherait plus de la prononciation chinoise). « Tao » signifie « la voie ». Il est difficile d’estimer le nombre de taoïstes dans le monde, surtout en Chine, où la religion fut rendue illégale durant le règne communiste. Les statistiques font mention de 30 à 300 millions en Chine seulement. On croit également qu’il y aurait plus de 30 millions de taoïstes à Taiwan, Macao et Hong Kong et qu’il y aurait de petites communautés éparpillées à travers le Vietnam, la Corée, le Laos et la Thaïlande. On estime que les États-Unis et la Grande-Bretagne abritent chacun une communauté de 30 000 taoïstes. Bien qu’il s’agisse d’une religion peu connue à l’extérieur de l’Asie, ses fidèles représentent une proportion importante de la population mondiale du 21e siècle.
Bien que nous en sachions peu sur le taoïsme, nous en avons tous vu des dérivés dans notre quotidien. En effet, c’est du taoïsme que proviennent l’acupuncture, le feng shui, les populaires symboles du yin et du yang, le terme « zen » et le taï chi. On retrouve également les influences du taoïsme dans la médecine traditionnelle chinoise et la méditation.
Les origines du taoïsme sont obscures. Ses premiers enseignements remontent à Lao Tzu qui, au cinquième siècle avant J.-C., rédigea l’influent ouvrage taoïste intitulé Dao De Jing (La voie et son pouvoir). Tandis que la seule autre philosophie populaire chinoise de l’époque, le confucianisme, mettait l’accent sur l’action éthique, le taoïsme encourageait la vertu du Wu Wei (la non-action, ou prendre les choses comme elles viennent). Le pouvoir du vide, du détachement, de la réceptivité et de la spontanéité, la force de la douceur, le relativisme des valeurs humaines et la quête d’une longue vie sont des valeurs du taoïsme. À cette époque, le taoïste était surtout soucieux d’atteindre l’immortalité et c’est ce qui mena au développement de l’alchimie et des méthodes de méditation.
Le taoïsme a fourni une alternative à la tradition confucianiste, en Chine, et les deux traditions ont souvent coexisté, chez les individus. Avec le temps, toutefois, le taoïsme s’est de plus en plus retrouvé en compétition directe avec le bouddhisme. Pour survivre, il fut contraint d’intégrer des pratiques bouddhistes et d’anciennes pratiques folkloriques chinoises en son sein afin de répondre aux exigences des enseignants de l’époque. Ce taoïsme plus philosophique a inspiré plusieurs peintres et poètes chinois à travers les siècles.
Les concepts, croyances et pratiques taoïstes
Selon les taoïstes, le tao est le principe absolu à la base de l’univers. Il allie les principes du yin et du yang et signifie « la voie » ou « le code de conduite ». La puissance de cette voie est appelée Te. Selon les taoïstes, le tao afflue à travers toutes les formes de vie et le croyant doit s’efforcer d’harmoniser sa vie avec cette force. Les taoïstes considèrent que l’Être Suprême ou la vérité ultime se situent au-delà des mots et sont impossibles à conceptualiser. C’est là une idée de Dieu similaire à celle d’autres religions, mais les taoïstes n’utilisent pratiquement jamais le mot « dieu ». À l’origine, le taoïsme n’incluait pas la croyance en un créateur dans sa philosophie. Il s’agissait d’un courant clairement non-théiste et les enseignements de Lao Tzu ne laissèrent jamais entendre que le tao (la voie) était lié à une divinité quelconque.
Il n’y a pas, dans le taoïsme, de concept du bien versus le mal; il affirme plutôt l’interdépendance de toutes les dualités, d’où le concept des opposés du yin et du yang. Toute action comprend une part de négatif (yin) et une part de positif (yang). C’est ainsi que lorsqu’une personne décrit une chose comme bonne, elle crée automatiquement du mal.[1] Les taoïstes n’acceptent pas, non plus, l’idée du salut versus la damnation. Il n’y a donc pas de concept de paradis ni d’enfer, l’objectif ultime étant de retourner au Tao, i.e. à la force de vie universelle. Vivre simplement et en harmonie avec le tao, de même qu’éviter le matérialisme excessif et la quête du prestige mèneront à une vie satisfaisante.
Les taoïstes croient qu’il y a « trois joyaux » sur la base desquels ils doivent mener leur vie : la compassion, la modération et l’humilité. Le taoïsme est une religion polythéiste, car il croit en un certain nombre de déités qui seraient chacune une manifestation d’un des aspects du tao. Les taoïstes ne vénèrent cependant pas ces déités, lesquelles ne sont pas, non plus, personnifiées. Ils n’ont pas davantage recours à elles pour régler leurs problèmes; ils ont plutôt tendance à régler leurs problèmes par la méditation et la réflexion.
Le cœur du rituel taoïste est le concept visant à apporter de l’ordre et de l’harmonie dans le cosmos. Les rituels taoïstes incluent la purification, la méditation et les offrandes aux déités. Les détails de ces rituels sont souvent complexes et techniques et c’est pourquoi seuls les prêtres s’en chargent. Ces rituels comprennent des chants, des danses et l’utilisation d’instruments de musique par les prêtres et leurs assistants. Le taoïsme comprend aussi diverses pratiques physiques comme des exercices de respiration, des massages, des arts martiaux, du yoga et de la méditation. Ces exercices visent à transformer les gens à la fois mentalement et physiquement et à les faire vivre en harmonie avec le tao.
Le taoïsme, le confucianisme et le bouddhisme sont les trois religions dominantes en Chine. Elles ont toutes de longues et originales histoires et ont toutes, à un moment de leur histoire, été considérées comme des philosophies plutôt que comme des religions. Seul le taoïsme a d’abord été une philosophie qui a plus tard intégré des aspects religieux dérivés du folklore chinois afin de satisfaire tous les fidèles, actuels et potentiels.
Dans le deuxième article, nous étudierons de plus près les trois joyaux du taoïsme et verrons s’il s’agit des seuls aspects que le taoïsme a en commun avec l’islam. Nous parlerons également du concept de Dieu dans le taoïsme et le comparerons avec celui de l’islam.
Note de bas de page:
[1] (http://www.beliefnet.com/Faiths/Taoism/What-Do-Taoists-Believe.aspx?p=7#ixzz1tOXjJXT7)
Qu’est-ce que le taoïsme? (partie 2 de 2): La vertu ne mène pas toujours à la religion
Description: Une brève comparaison entre les croyances du taoïsme et celles de l’islam.
- par Aisha Stacey (© 2015 IslamReligion.com)
- Publié le 23 Nov 2015
- Dernière mise à jour le 23 Nov 2015
- imprimés: 20
- Lus: 17,334
- Évalué par: 0
- Envoyés: 0
- Commentés: 1
Compassion, modération et humilité; ce sont les trois joyaux ou attributs qui forment la philosophie de vie des taoïstes. Ce sont des traits moraux tout aussi estimés des musulmans. Le premier des trois joyaux est le ci, qui signifie, littéralement, compassion, tendresse, amour, indulgence, gentillesse, bonté ou bienveillance. Il s’agit également d’un terme chinois classique pour « mère ». Le second est le jian, littéralement modération, économie, retenue. Le troisième est une phrase chinoise à six caractères : Bugan wei tianxia xian, qui est traduit par humilité, mais dont le sens est plus profond. Selon la sagesse taoïste, il s’agit de la voie à suivre pour éviter une mort prématurée. Être constamment sous les feux de la rampe, c’est se rendre vulnérable et s’exposer aux force destructrices du monde, tandis que rester dans l’ombre et demeurer humble équivaut à se donner du temps pour mûrir pleinement et porter fruit.
Comparons cela avec les mêmes traits tels qu’enseignés par l’islam. Le plus important à souligner est que la compassion vient en premier et qu’il s’agit d’un mot utilisé, dans le chinois classique, pour désigner la mère. Nous savons qu’en islam, Dieu est souvent appelé le Tout Miséricordieux. Le dictionnaire définit la miséricorde comme une disposition à être bon et à pardonner et comme le sentiment qui pousse à la compassion. Le terme arabe pour miséricorde est rahmah et le terme arabe pour matrice est rahim, qui est dérivé du même mot-racine. Ce lien entre la miséricorde de Dieu et la matrice n’est pas anodin. Dieu nous nourrit et nous protège, tout comme la matrice nourrit et protège l’enfant à naître. Le lien entre la miséricorde, la compassion et la maternité est évident à la fois dans le terme islamique rahmah et dans le joyau taoïste.
Qu’en est-il de la modération? Il s’agit clairement d’une vertu importante dans le taoïsme. Et en islam? Selon l’approche holistique que l’on retrouve dans l’islam, tout doit être fait en modération. Il n’y a donc aucune justification aux comportements extrêmes ou fanatiques. Le Coran fait référence à ceux qui suivent l’islam comme à une communauté suivant un juste milieu :
« Ainsi avons-Nous fait de vous la nation du juste milieu… » (Coran 2:143)
Le troisième joyau, l’humilité, est aussi une vertu tenue en haute estime par l’islam. L’islam enseigne que l’humilité est une qualité qui nous ouvrira la porte de la félicité éternelle, dans l’au-delà, tandis que le taoïsme met plutôt l’accent sur l’importance de l’humilité en cette vie afin de mener une vie qui vaut la peine d’être vécue. Ibadah est le mot arabe pour désigner l’adoration. Mais la racine de ce mot, ouboudiyyah, fait référence au fait d’exprimer sa modestie ou son humilité. Il s’agit, ici, de l’humilité profonde qui habite celui ou celle qui est totalement soumis(e) à Dieu, le Très-Haut. L’adoration est une soumission à Dieu et ce qui pousse à la soumission, c’est l’humilité. Nous pouvons donc constater que les vertus essentielles du taoïsme et de l’islam sont à peu près les mêmes. Cela n’est pas vraiment étonnant, car la plupart des religions préconisent de hautes normes morales et des comportements vertueux.
Les lieux où se pratiquent les rituels taoïstes se nomment gong (palais) ou guan (temple). À l’origine, les taoïstes préféraient ériger leurs temples dans des lieux sereins comme les montagnes et les forêts, mais avec le temps, de plus en plus de temples furent construits dans les villes. Chacun de ces temples abrite un nombre important de statues représentant des déités ou ce que les taoïstes croient être des immortels. Cela nous amène à nous demander ce que pensent les taoïstes du concept d’unicité de Dieu. Comme nous l’avons appris dans le premier article, bien que les taoïstes reconnaissent la nécessité de l’existence d’un créateur, ils considèrent que ce dernier se situe au-delà de la compréhension humaine.
Par conséquent, il n’y a pas, dans le taoïsme, de concept de Dieu à proprement parler. Selon l’ouvrage intitulé « A personal Tao » (Un tao personnel), « cette question est non pertinente. Que Dieu existe ou non, cela ne change rien à la façon dont nous menons notre vie. Nos vies sont des expressions du lien qui nous unit à l’univers. Le respect de notre entourage et de notre environnement est une extension du respect que nous devons avoir pour nous-mêmes. Cette façon de vivre ne change pas et est indépendante de la nature de Dieu ou du tao. »[1]
Dans le premier article, nous avons mentionné que le taoïsme a intégré, au fil du temps, des notions d’autres philosophies et religions présentes en Chine; il est donc possible de pratiquer à la fois le taoïsme et une autre religion. C’est ainsi que plusieurs Chinois bouddhistes sont également taoïstes. Cela a mené à un type de polythéisme unique au taoïsme, qui n’existait pas, à l’origine, au sein de cette religion.
Il existe une hiérarchie de déités et d’immortels dans le taoïsme. Au sommet de la hiérarchie se trouvent le Vénéré céleste du début primordial, le Vénéré céleste du trésor sacré et le Vénéré céleste de la voie et de sa vertu. Suivent les déités de rangs inférieurs investies de responsabilités basées sur leurs connaissances. Celle qui occupe le plus haut rang est l’Empereur Jade, suivie de quatre déités majeures et d’autres êtres célestes et d’immortels. Diverses déités et immortels ont des responsabilités diverses. Parmi les plus connues sont les déités responsables du vent, de la pluie, du tonnerre, de la foudre, de l’eau et du feu, le Dieu de la richesse, le Dieu de la cuisine, le Dieu de la cité et le Dieu du pays.[2]
L’idolâtrie et le polythéisme n’ont aucune place en islam et les musulmans ne croient pas qu’il soit possible de pratiquer plus d’une religion à la fois. Bien que le taoïsme et l’islam partagent certaines valeurs morales, là s’arrêtent leurs similitudes. Les musulmans croient en un Dieu unique et incomparable, Tout-Puissant, Créateur, Souverain et Administrateur de l’univers tout entier. Il est le seul qui soit digne d’être adoré et invoqué et c’est pour Lui seul que doit être fait tout acte d’adoration. Il n’a aucunement besoin de Sa création; c’est plutôt Sa création qui a besoin de Lui et qui dépend de Lui. L’islam propose un objectif de vie très clair et a fourni des lois et des règles de vie qui mènent au succès et au contentement à la fois ici-bas et dans l’au-delà.
Ajouter un commentaire