Dieu réside-t-Il au sein de Sa création?
Description: Cet article discute et réfute brièvement l’idée selon laquelle Dieu est physiquement et littéralement présent parmi nous et démontre que, conceptuellement, Sa suprématie sur Sa création est la seule chose qui lui sied.
- par Tariq Jalal (© 2015 IslamReligion.com)
- Publié le 18 Jul 2016
- Dernière mise à jour le 18 Jul 2016
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Dieu est distinct de Sa création; rien, de Lui, ne peut résider en son sein et rien, provenant de Sa création, ne peut se retrouver en Lui.
Cet argument a été réitéré par tous les théologiens musulmans pour confirmer qu’il n’y a pas de place, en islam, pour la croyance selon laquelle Dieu ferait partie de Sa propre création, un concept connu sous le nom d’omniprésence ou d’ubiquité de Dieu ou encore de panthéisme (de pan- "tout" + le grec theos "dieu"). [1] Ce concept est à la base de presque toutes les religions et mythologies du monde. Il fait de la création une manifestation de Dieu. Les théologies anthropomorphiques – celles qui prêtent des attributs humains à Dieu – font du panthéisme leur croyance de base. On rapporte que Hindu Lord Krishna a dit :
« J’existe au sein de toutes les créatures.
Alors l’homme discipliné qui m’est dévoué
Saisit le caractère unique de la vie
Et où qu’il soit, il est en moi. »[2]
La religion païenne indigène du Japon, connue sous le nom de Shinto (litt. la voie des dieux) croit en Kami, qui fait référence à la divinité, ou essence sacrée, qui se manifeste sous de multiples formes. Ses fidèles croient que les pierres, les arbres, les rivières, les animaux, les lieux et même les gens possèdent les caractéristiques de Kami. Kami et les êtres humains existent au sein du même monde et partagent sa complexité.[3]
Pourquoi l’islam est-il si résolument opposé à cette notion faisant presque l’unanimité chez les autres religions? Les érudits musulmans citent plus de mille preuves, tirées uniquement du Coran, démontrant que Dieu jouit de la suprématie la plus élevée qui soit et qu’Il Se situe bien au-delà des cieux (et donc au-dessus de la création) :
« Glorifie le nom de ton Seigneur, le Très-Haut. » (Coran 87:1)
« Ils craignent leur Seigneur, au-dessus d’eux, et font ce qui leur est commandé. » (Coran 16:50)
Cela n’empêche toutefois pas le fait que Dieu ait une connaissance parfaite et constante de Sa création (sans en faire Lui-même partie). Il est le Créateur et le Soutien de tout ce qui existe et rien n’existe sans qu’Il l’ait voulu. Il a le pouvoir et l’autorité suprêmes sur tout ce qui existe.
Cela ne signifie pas grand-chose pour ceux qui ne croient pas que le Coran soit la parole révélée de Dieu. Il y a cependant d’importantes inexactitudes conceptuelles résultant du fait de croire que Dieu fait physiquement et littéralement partie de Sa création. Ce qui découle de ce concept va totalement à l’encontre de la logique, de la religion et de la moralité.
1- Le panthéisme est une forme d’athéisme où l’on retrouve une vénération de la création ou, comme le dit Richard Dawkins, un athéisme exhibitionniste.[4]. Il s’agit d’un rejet de Dieu en tant qu’être indépendant, où l’on transmet les émotions religieuses au monde physique. L’athéisme cherche à interpréter la vie sans la présence de Dieu, tandis que le panthéisme attire les scientifiques, entre autres, qui ne peuvent se passer totalement de spiritualité, surtout lorsqu’ils constatent la symétrie et l’ordre parfait de la création. Dans l’une de ses lettres, Albert Einstein, un panthéiste avoué, écrit : « Nous, disciple de Spinoza, voyons Dieu dans l’ordre incroyable et dans les lois cosmiques de tout ce qui existe et dans son âme ["Beseeltheit"], alors qu’il se manifeste dans l’homme et dans les animaux. »[5] Dieu devient donc testable et matière à recherches et les scientifiques peuvent être leur propre clergé!
2- Dans ce contexte, les questions « Dieu et l’univers ont-ils commencé à exister en même temps? » et « Dieu est-Il le créateur de l’univers? » deviennent redondantes. La réponse est que Dieu ne peut avoir existé avant une chose sans laquelle Il ne peut être imaginé et qu’Il ne peut avoir créé une chose sans être distinct de cette chose, Il ne peut être le créateur d’une création dans laquelle Il est intégré. Bref, cette approche théologique a grandement rendu Dieu invalide et incapable de subsister de façon autonome ne serait-ce que pour une seconde. Dans son Livre des chatons des sagesses, Ibn Arabi, un soufi panthéiste, explique comment Dieu (qui est infini) est compris au sein de la création finie dans une métaphore à la fois frappante et difficilement compréhensible : « L’univers est la subsistance de Dieu et Dieu est la subsistance de l’univers; tout comme la déité avale le cosmos, le cosmos avale également la déité. » Dieu et le monde doivent donc avoir commencé à exister ensemble.
3. Il va sans dire que tous les actes d’adoration classiques deviennent superflus. Si Dieu m’imprègne et que j’imprègne Dieu, pourquoi devrais-je prier qui que ce soit alors que j’ai un Dieu en moi. Autrement dit, comment concevoir que Dieu soit prié et invoqué par Dieu?! En fait, dans ces circonstances, s’abstenir de tout acte d’adoration serait plus logique; la hiérarchie spirituelle de toute la création, au sommet de laquelle est censé se trouver Dieu, s’écroule et devient une léthargie spirituelle démotivante.
4. On peut aisément comprendre pourquoi certains objets ou animaux sont vénérés, surtout quand divers mythes font allusion à l’étincelle divine qui les habite. Intensément fondée sur l’adoration des animaux et de la nature, l’hindouisme voit les animaux et les éléments de la nature comme des manifestations du pouvoir divin. Cette élévation de la nature ne peut cependant pas se faire sans un certain dénigrement de la Divinité, qui a toujours été synonyme de sainteté et de majesté. Dieu est devenu tellement banal qu’Il peut être présent dans une putréfaction ou n’importe quel autre endroit non approprié auquel on peut penser. Le soufi panthéiste Ibn Arabi, comme tous les disserteurs de cette théorie, exclut les animaux en décomposition, les marais putrides et odorants et tous les lieux sales et négligés où l’on sous-entend la présence de Dieu et sélectionne poétiquement les lieux où il croit que Dieu se trouve :
Mon cœur peut prendre
N’importe quelle forme;
Un pré pour les gazelles
Un cloître pour les moines
Pour les idoles, un lieu sacré
La Ka’bah pour les pèlerins
Les tables de la Torah
Les parchemins du Coran[6]
Les soufis sont connus pour leur poursuite du Fanaa’ (litt. annihilation de soi), dont le but est de spirituellement se perdre en Dieu, ce qui constitue, encore une fois, une déviation conceptuelle totalement enveloppée de mystère. Comme dans tous les paradigmes parallèles, on attend des fidèles qu’ils aient tout simplement la foi et d’accepter d’être confus lorsqu’ils pensent à Dieu, plutôt que de tenter de comprendre.
6. S’étant intentionnellement dissociés du concept d’un Dieu transcendant et imposant, le panthéisme peut difficilement fournir une éthique applicable et concevable. Une Déité transcendante est essentielle pour les concepts du mal et du péché et la moralité doit être motivée par autre chose que par la rétribution ou le châtiment, une chose dont aucune législation humaine n’a jamais réussi à se passer.
De même, la bipolarité du bien et du mal ne peuvent être inclus dans un tel contexte. Dieu, que l’on considère bon et parfait, ne peut dégager du mal. Toutes les manifestations du mal auxquelles nous assistons doivent, par conséquent, être classées dans la catégorie du bien. Une telle théorie est incompatible avec les valeurs fondamentales qui caractérisent la vie humaine et en conflit direct avec la logique pure. Quand les moyens de dissuasion éthiques sont absents, l’anarchie prévaut et la tentation de faire le mal ne peut être freinée. « Si Dieu inclut tout ce qui existe et que Dieu est parfait et bon, alors tout ce qui existe doit être parfait et bon. Une conclusion qui semble aller totalement contre notre expérience commune, qui démontre que la plupart des choses, en ce monde, sont loin d’être parfaites et bonnes. »[7]
Note de bas de page:
[1] Oxford Dictionary of English
[2] Bhagavad Gita 31, chapitre 6
[4] Richard Dawkins, The God Delusion (L’illusion de Dieu) (2006)p. 40.
[5] Max Jammer, Einstein and Religion: Physics and Theology (Einstein et la religion : physique et théologie)
[6] Ibn Arabi, Tarjuman al-Ashwaq, traduit en anglais par Michael A. Sells, poème 11
[7] The Stanford Encyclopedia of Philosophy
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