La Nation de l’islam (partie 1 de 2): Quand doit-on considérer qu’un musulman n’est pas un musulman?
Description: L’ascension et l’histoire d’un mouvement religieux incorrectement associé à l’islam.
- par Aisha Stacey (© 2015 IslamReligion.com)
- Publié le 19 Jan 2015
- Dernière mise à jour le 19 Jan 2015
- imprimés: 68
- Lus: 20,347 (moyenne quotidienne: 6)
- Évalué par: 131
- Envoyés: 0
- Commentés: 0
Pour plusieurs, le nom de Nation of Islam (Nation de l’islam) est familier. Cependant, certains croient à tort qu’il s’agit tout simplement d’une appellation différente pour désigner ceux qui suivent les enseignements du prophète Mohammed (c’est-à-dire la oummah de Mohammed). D’autres associent la Nation de l’islam aux Afro-Américains. Cette association peut paraître évidente, mais une recherche approfondie démontre qu’elle n’est pas tout à fait exacte. Même si la Nation de l’islam applique, à l’occasion, certaines règles du véritable islam, son système de croyance est non seulement totalement différent, mais va complètement à l’encontre des principes de l’islam. Le premier pilier de l’islam, son fondement même, est l’unicité de Dieu, représentée par la shahadah, qui dit « Il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah et Mohammed est Son dernier messager ».
À la fin des années 20, un homme se mit à faire du porte à porte, dans les rues de Détroit, pour vendre des soies et des objets artisanaux africains. À l’époque, il se faisait appeler Wallace Fard Muhammad. Ses origines et son appartenance ethnique sont toujours l’objet d’un débat. Cependant, une chose est certaine : sa personnalité charismatique lui permit de convaincre plusieurs membres de la communauté afro-américaine d’embrasser sa religion nouvellement fondée, la « Nation de l’islam ». En 1930, il fonda le premier temple de la Nation de l’islam. Wallace Fard y enseigna « la liberté, la justice et l’égalité » à ses fidèles, qu’il appelait « la tribu de Shabazz, perdue dans la contrée sauvage de l’Amérique du Nord ». Il enseigna aux Afro-Américains pauvres qu’ils étaient un peuple « avec un passé, un avenir, une histoire et une destinée ». En l’espace de trois ans, il avait converti près de 8000 d’entre eux.[1]
Un des fidèles les plus dévoués de W Fard Muhammad était Elijah Poole, un mécanicien au chômage de Georgie. Il changea son nom pour Elijah Muhammad et devint rapidement le ministre principal de Fard. À l’été 1934, Fard disparut soudainement, de façon aussi mystérieuse qu’il était apparu. Elijah Muhammad devint le nouveau leader du mouvement et prit le titre de « messager d’Allah ». Quand on sait à quel point s’attribuer un tel titre constitue un blasphème, on comprend à quel point ce mouvement n’a rien à voir avec l’islam. On le comprend encore plus clairement lorsqu’on lit cet extrait du livre d’Elijah Muhammad intitulé Message to the Blackman (message à l’homme noir) :
« Allah (Dieu) est venu à nous, en provenance de la ville sainte de La Mecque (Arabie), en 1930. Il portait le nom de Wallace D.Fard, signant souvent W.D.Fard. La troisième année (1933), il commença à signer son nom W.F. Muhammad (pour Wallace Fard Muhammad). Il vint seul. Il entreprit de nous enseigner la connaissance de nous-mêmes, de Dieu et du diable, des dimensions de la terre et des autres planètes et des civilisations vivant sur des planètes autres que la terre. »[2]
L’islam affirme catégoriquement et sans réserve aucune qu’il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah. Il n’a ni partenaires ni associés ni fils, ni filles. Dieu ne revêt jamais une forme humaine et le simple fait de suggérer une telle possibilité constitue un péché majeur et une déviation des enseignements de l’islam.
Le converti le plus connu de la Nation de l’islam fut Malcolm Little, qui se convertit dans une prison de Concord, au Massachusetts, en 1947. Il est maintenant mieux connu sous le nom de Malcolm X. Alors que Malcolm était en prison, Elijah Muhammad prêchait que la société d’hommes blancs travaillait activement à empêcher les Afro-Américains de se responsabiliser et de réussir aux niveaux politique, économique et social. La Nation de l’islam prêchait également pour la création d’un État noir, d’où seraient exclus les Blancs. Lorsqu’il fut libéré, en 1952, Malcolm était un fidèle dévoué et avait adopté le X comme nom de famille. (Little était un nom d’esclave et Malcolm choisit « X » pour faire référence à son nom tribal d’origine qu’il ne connaissait pas et qui avait été oublié par sa famille.)
Malcolm était à la fois intelligent et articulé et devint rapidement le porte-parole national de la Nation de l’islam. Il fonda de nouvelles mosquées (temples) et utilisa habilement les médias de l’époque pour propager le message de son groupe à travers les États-Unis. Sous son leadership, le nombre de fidèles passa de 500, en 1952, à plus de 30 000, en 1963. Durant cette période, Malcolm prêcha que les Noirs étaient génétiquement supérieurs aux Blancs, mais qu’ils étaient dominés par un système qui faisait la promotion de la suprématie blanche.
« Quiconque a étudié la phase génétique de la biologie sait que le blanc est considéré comme récessif et que le noir est considéré comme dominant. L’économie américaine tout entière est basée sur la suprématie blanche. Même les philosophies religieuses sont basées sur la suprématie blanche. Un Jésus blanc, une sainte vierge blanche, des anges blancs… ils sont tous blancs. Mais, bien entendu, on parle d’un diable noir. Le fondement politique de l’Oncle Sam est basé sur la suprématie blanche, reléguant les non-Blancs à un statut de citoyens de seconde classe. Il va sans dire que la philosophie sociale est, elle aussi, strictement basée sur la suprématie blanche. Et que le système d’éducation perpétue cette notion de suprématie blanche. »[3]
Au fil des ans, et par la grâce de Dieu, Malcolm X se rapprocha du véritable islam. Il était très cultivé et voyagea beaucoup. Au début de 1964, il déclara officiellement son retrait de la Nation de l’islam et s’en dissocia totalement, parlant de différends irréconciliables et de tensions grandissantes entre Elijah Muhammad et lui-même. La même année, il accomplit le pèlerinage à La Mecque. Il y fut bouleversé par la fraternité dont il fut témoin, entre les musulmans venus du monde entier, et revint aux États-Unis en tant que musulman sunnite déterminé à prêcher le véritable islam aux gens de toutes races. Malcolm X fut assassiné par balle au Audoban Ballroom, à Harlem, New York, le 21 février 1965.
Elijah Muhammad continua de diriger la Nation de l’islam jusqu’à sa mort (naturelle), le 25 février 1975. Son fils, Warith Deen Muhammad, devint le nouveau leader de la Nation de l’islam. Comme il avait acquis un certain savoir sur le véritable islam, il apporta, petit à petit, divers changements au sein de l’organisation, jusqu’à guider ses fidèles vers l’islam sunnite.
« J’ai tenté d’amener ce qu’on appelait la Nation de l’islam à former une communauté musulmane normale. Car l’idée que nous avions toujours eue d’une communauté n’était pas islamique et constituait un héritage de l’époque du nationalisme noir. »[4]
Si certains fidèles d’Elijah Muhammad accueillirent positivement les changements apportés par Wallace, d’autres s’en montrèrent fort mécontents. En 1979, cette faction, menée par Louis Farrakhan, se sépara de la nouvelle American Muslim Mission (mission musulmane américaine) de Wallace, qui accueillait désormais des Blancs au sein de son groupe. Le groupe de Farrakhan continua d’adhérer aux enseignements originaux de la suprématie noire et garda le nom de Nation of islam.
Le Watchman Expositor[5], un ministère chrétien apologétique fondé en 1979, affirme que « bien que l’organisation de Farrakhan prétende être la Nation de l’islam authentique, il existe trois autres groupes prétendant la même chose. John Muhammad, le frère d’Elijah Muhammad, en dirige un à Détroit. Un dénommé Silas Muhammad en dirige un autre à Atlanta. Enfin, un troisième, à Baltimore, est dirigé par Emanuel Abdulla Muhammad. La plus reconnue de ces quatre organisations est celle fondée par Louis Farrakhan. »
Dans la deuxième partie, nous plongerons plus profondément dans l’univers de la Nation de l’islam et découvrirons qu’elle a probablement plus en commun avec la scientologie qu’avec l’islam.
Note de bas de page:
[1] Gnosis Magazine, p. 59. & Lincoln, The Black Church Since Frazier, (New York: Schocken Books, 1989) p. 163. Les deux sont cités dans l’article The Nation of Islam et archivés à cette adresse : http://www.watchman.org/profile/nationofislampro.htm
[2] Message to the Blackman, Elijah Muhammad. Chapitre 8, paragraphe 5.
[3] Alex Haley, "The Playboy Interview: Malcolm X", Playboy Magazine, Mai 1963
[4] The Atlanta Journal Constitution, 4 mai, 1985, p. 3C.
[5] (http://www.watchman.org/profile/nationofislampro.htm)
Ajouter un commentaire