Sa’ad Laws, ex-chrétien, États-Unis
Description: Comment l’autobiographie de Malcolm X a amené un adolescent américain, issu de la classe moyenne, à embrasser l’islam.
- par Sa’ad Laws
- Publié le 12 Jan 2015
- Dernière mise à jour le 11 Jan 2015
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On m’a souvent demandé pourquoi je m’étais converti à l’islam. Car il n’est pas fréquent de voir un Blanc issu des régions rurales américaines devenir musulman. Je crois que l’aspect le plus étonnant de mon histoire est la façon dont elle a commencé. Il est vrai qu’elle n’est pas semblable à celles qu’on lit souvent sur les gens qui faisaient partie de gangs, qui prenaient de la drogue ou qui adoraient le diable avant de découvrir la vérité. Je viens d’un milieu assez typique. J’ai deux sœurs et un frère et mes parents sont toujours mariés. Mon père est ingénieur, tandis que ma mère est toujours restée à la maison pour s’occuper de sa famille (pour reprendre ses termes, elle est ingénieure domestique). Notre famille fait partie de la classe moyenne et vit dans un petit village, au sud de nulle part. Pour vous donner une idée d’à quel point l’endroit est reculé, il y a un magasin général situé à un mille de notre maison et dont la propriétaire nous regarde toujours quitter son commerce en nous demandant de revenir bientôt.
La religion a toujours été un sujet un peu étrange, chez nous. Mon père est un Irlandais catholique de naissance, tandis que ma mère est méthodiste. Nous allions à la messe de temps à autre, mais de manière générale, la religion, chez nous, était cette chose « spirituelle » que chacun gardait dans son cœur. Je me souviens, enfant, avoir regardé une petite statuette de Jésus et m’être demandé pourquoi nous devions, dans nos prières, lui demander à lui ce que nous voulions voir se réaliser. Pourquoi ne demandions-nous pas directement à Dieu? Enfant, le concept de trinité n’a jamais eu de sens, pour moi; mais comme je vivais au sein d’une famille chrétienne qui n’était pas vraiment pratiquante, cela ne constituait pas réellement un problème.
Lorsque j’entrai à l’école secondaire, je remarquai rapidement que j’étais un peu différent des autres. À l’école, comme dans la plupart des écoles américaines, il y avait, à la base, quatre groupes auxquels les élèves pouvaient s’associer : les « alternatifs », les « preppies », les « crack-heads » et les afro-américains (comme le comté dans lequel j’habitais était Blanc à 90%, ils étaient un peu à part et avaient tendance à se tenir ensemble). Puis, il y avait moi. En y repensant, je sais que c’était là une bénédiction d’Allah. J’ai la conviction qu’Allah me protégeait de toutes ces choses dans lesquelles j’aurais pu, en tant qu’adolescent, m’impliquer, mais qui auraient fini par me conduire à ma perte. Par exemple, durant tout mon secondaire, j’ai toujours voulu avoir une petite amie, comme les autres gars autour de moi. Mais chaque fois qu’une occasion se présentait à moi, j’étais envahi par la timidité au point où j’étais littéralement incapable de parler. Aujourd’hui, je suis très reconnaissant pour cela, même si, à l’époque, j’en étais mécontent.
Même si je me tenais avec le groupe « alternatif », je ne m’y intégrai jamais pleinement. Ils aimaient discuter de musique, parler dans le dos de leurs amis, consommer de la drogue et s’adonner à toutes sortes de passe-temps abrutissants. De mon côté, j’aimais les Black Panthers, Medgar Evers et Malcolm X, ce qui me faisait paraître un peu étrange aux yeux des autres, qui m’accusaient d’aspirer à « devenir Noir ». C’est lors de ma onzième année que je lus l’autobiographie de Malcolm X, que l’on m’avait d’abord présenté comme l’ultime leader anti-Blanc. Je lus son autobiographie d’un trait, sans pouvoir me résigner à poser le livre; son histoire était tout simplement fascinante. Cet homme était venu de nulle part et s’était transformé en une personnalité publique fort respectable et admirable.
C’est le chapitre intitulé « Mecca » (la Mecque) qui eut l’effet le plus profond sur moi. Dans ce chapitre, il raconte à quel point il fut touché par la générosité et la compassion non seulement des musulmans qu’il rencontra au Hajj, mais de l’islam lui-même. En lisant cela, je me demandai : « mais qui sont ces gens [i.e. les musulmans]? ». Je me rendis à la bibliothèque de l’école et empruntai tous les livres sur l’islam que j’y trouvai. Je fus étonné de ce que j’y découvris; ces gens croyaient aux mêmes principes que j’avais toujours trouvés innés, chez moi. Ils disaient qu’il n’y avait qu’un seul Dieu et que Jésus n’était pas Son fils, mais un messager et un prophète. J’en fus totalement soufflé. Et je sus, dès ce moment, que peu importe ce qu’était l’islam, il me fallait en faire partie.
Après cette lecture, je me considérai comme musulman. Si l’on m’avait demandé quelle était ma religion, j’aurais répondu l’islam. Même si je n’avais pas officiellement prononcé la shahadah (attestation de foi), dans mon cœur, j’étais bel et bien musulman. À l’époque, je n’en connaissais pourtant pas beaucoup sur cette religion. Je savais, par exemple, que les musulmans sont censés prier quotidiennement, mais je ne savais pas combien de fois ni de quelle manière. J’étais relativement ignorant sur les pratiques de l’islam, mais il n’y avait personne, dans mon entourage, à qui j’aurais pu demander de l’aide. C’est alors que je reçus l’élément déclencheur dont j’avais besoin. Un de mes amis, excédé de m’entendre dire à tout bout de champ que j’étais musulman (j’étais plutôt zélé, à ce moment-là), finit par me dire que je n’étais pas un vrai musulman. « Tu ne pries même pas », me dit-il. Et je pensai, à part moi, qu’il avait raison. Je savais que je devais avancer, au sein de cette religion, et la prendre plus au sérieux. Et c’est là que je fis face à un problème.
Qui étaient les musulmans et où pouvais-je les trouver? Évidemment, vous imaginez bien qu’il n’y avait pas de mosquée au coin de la rue. Là où je vivais, vous auriez eu plus de chance de trouver de l’or qu’un musulman. Alors je pris le bottin et trouvai une mosquée à Washington D.C. Malheureusement, cela se situait à deux heures et demie de chez moi. Je pris malgré tout la décision de les appeler. Au moment de composer le numéro, j’étais très nerveux; je m’apprêtais à parler à un musulman! Ils semblèrent agréablement surpris par mon enthousiasme et ma hâte de devenir musulman. Mais ils souhaitaient que j’aille les visiter, à la mosquée, ce qui constituait un problème, pour moi.
À l’époque, j’étais encore adolescent et sous la tutelle de mes parents, qui contrôlaient toutes mes allées et venues, d’autant plus que le seul véhicule que j’avais à ma disposition était le leur. Mes chances d’obtenir l’autorisation d’utiliser cette voiture pour me rendre à Washington étaient minces. Qu’allais-je faire? Si je ne pouvais aller à la rencontre des musulmans, comment allais-je moi-même le devenir? Je leur demandai s’ils pouvaient venir me voir, dans mon village, mais cela ne leur était pas possible. Je voulais pourtant régler cette question; je ne me voyais pas attendre encore un an ou deux sans rien faire. C’est après beaucoup d’insistance que je finis par convaincre le frère de me laisser prononcer la shahadah au téléphone. J’imagine que c’était une première, pour eux.
C’est donc ainsi que je suis devenu musulman. Avec du recul, je constate à quel point j’ai été incroyablement béni dans la façon dont Dieu m’a guidé vers l’islam. Je revois mes camarades d’école et comment ils sont perdus, aujourd’hui. Et je vois ce que je suis moi-même devenu. Bien sûr, j’ai mes défauts et je dois encore travailler à m’améliorer, autant dans mon islam qu’au niveau de mon caractère. Mais je ne peux m’empêcher d’être émerveillé par le fait qu’Allah m’ait guidé, qu’Il m’ait choisi, moi personnellement. Et à partir de quoi? À partir de rien.
J’y repense et je me demande : « Qu’est-ce qui a fait qu’Allah m’a guidé? ». Guidé vers cette « religion des Arabes », qui m’était si étrangère que j’avais l’impression d’avoir besoin d’un passeport pour y accéder. Ce qui m’est arrivé ne provient que d’Allah et c’est Lui seul qui m’a guidé. J’en suis époustouflé quand j’y pense. Je ne sais pas pourquoi, mais Allah m’a choisi pour être musulman. Je me sens comme si on m’avait tiré du feu de l’Enfer, comme si on m’avait retiré de ses cendres. Et le fait d’avoir été guidé par Allah, et par Allah seul, constitue la plus grande bénédiction que j’aie jamais reçue.
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