Le Prophète et l’alcoolique
Description: Le prophète Mohammed ne marginalisait pas ceux des fidèles qui commettaient des péchés et cette attitude faisait en sorte que les pécheurs se reprenaient plus facilement en main.
- par Sheikh Abd al-Wahhab al-Turayri (islamtoday.net)[édité par islamreligion.com]
- Publié le 21 Aug 2017
- Dernière mise à jour le 21 Aug 2017
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À l’époque du Prophète, il y avait un homme prénommé Abdallah qui aimait tant Dieu et Son messager que le Prophète avait dit, à son sujet : « En vérité, il aime Dieu et Son messager. »[1]
Il aimait tant le Prophète qu’il avait pour habitude de lui offrir des mets délicats importés à Médine. Quand une caravane marchande arrivait à Médine, il y accourait et choisissait des choses comme du beurre ou du miel, qu’il apportait en cadeau au Prophète. Plus tard, quand le vendeur réclamait son argent, Abdallah le conduisait au Prophète et lui disait : « Peux-tu donner son argent à cet homme? »
Le Prophète disait alors : « Ne m’avais-tu pas offert ces choses en cadeau? »
Et Abdallah répondait : « Oui, ô messager de Dieu. Mais je n’ai pas les moyens de les payer! »
Les deux hommes riaient et le Prophète donnait son argent au marchand.
C’était là le genre de relation joviale qui unissait Abdallah et le Prophète.
Il faut dire, cependant, qu’Abdallah était alcoolique. Il était parfois si ivre, qu’on le trouvait titubant dans les rues de Médine. On l’amenait alors devant le Prophète, afin qu’il le condamne pour ivresse publique et, chaque fois, le Prophète prescrivait le châtiment prévu pour cette offense. Et cela se reproduisait régulièrement.
Un jour, alors qu’Abdallah s’en allait après avoir reçu un autre châtiment, un des compagnons cria, méprisant : « Que Dieu le maudisse! Combien de fois a-t-il été amené pour la même offense?! »
L’entendant, le Prophète le réprimanda : « Ne le maudis pas! Car je jure par Dieu qu’il aime beaucoup Dieu et Son messager. » Puis, il ajouta : « N’aide pas le diable contre ton frère! »[2]
Il y a beaucoup à apprendre de cette attitude du Prophète.
Nous devrions considérer la relation entre ce compagnon et le Prophète, en dépit des péchés dudit compagnon. Cela n’empêcha nullement le Prophète de se montrer bon envers Abdallah, d’être ami et de rigoler avec lui.
Cela démontre que dans la société du Prophète, des gens n’étaient pas ostracisés et les croyants n’étaient pas divisés entre pieux et pécheurs, sans relations entre les deux groupes. C’était une société unie, inclusive, où chaque personne pouvait se trouver à un degré de foi différent. Certains étaient très vertueux, d’autres étaient modérément pieux et d’autres avaient plus tendance à sombrer dans le péché. Mais personne n’était écarté de la société et tous en faisaient partie.
Cette inclusion faisait en sorte que lorsque des membres de cette société commettaient des erreurs, l’effet de ces erreurs était limité. Comme nul n’était marginalisé, il n’y avait pas d’occasion, pour le péché, de se répandre. Quand une personne faisait une erreur, elle ne perdait pas le soutien de ses frères et sœurs, qui étaient là pour l’aider à revenir sur le droit chemin.
Une autre leçon à tirer de la conduite du Prophète est l’importance de garder espoir et de demeurer positif. En dépit du fait qu’Abdallah était fréquemment amené devant le Prophète pour ivresse publique, le Prophète attira l’attention des gens sur l’une des qualités d’Abdallah, i.e. le fait qu’il aimait Dieu et Son messager. Pourtant, cette qualité n’était pas unique à Abdallah; elle était même commune à tous les croyants. Néanmoins, le Prophète choisit de le louer pour cela. Ce faisant, il cultivait, encourageait et renforçait cette qualité en chacun de ses compagnons. Il leur rappelait également que même si une personne dérape, la foi de cette personne et son amour pour Dieu demeurent intacts.
Il est facile d’imaginer ce qu’a dû ressentir Abdallah lorsqu’il apprit ce que le Prophète avait dit à son sujet. Il a dû voir cela comme un immense honneur. Sans doute cela l’aida-t-il à surmonter sa dépendance et lui redonna-t-il espoir, en plus de lui faire réaliser que l’essentiel de son être n’était pas marqué de façon permanente par ses erreurs.
Telle était la façon du Prophète de souligner les qualités de ceux qui commettent des erreurs ou qui sombrent dans le péché. Nous avons trop souvent tendance à oublier cela et à considérer des péchés passés comme une barrière à de bonnes actions futures. Une personne qui commet un péché grave n’arrive pratiquement jamais à le faire oublier et les gens l’associent éternellement à ce péché. Nous devons comprendre qu’une telle attitude ne fait qu’aider le diable à prendre le dessus sur le pécheur et à le pousser à commettre à nouveau le même péché. À l’opposé, l’approche du Prophète inspire la vertu. Lorsque des compagnons lui rappelèrent le problème d’alcoolisme d’Abdallah, il leur rappela l’amour d’Abdallah pour Dieu et Son messager.
Il ne fait aucun doute qu’Abdallah avait commis un péché majeur, car le Prophète avait clairement maudit les substances menant à l’ébriété. Néanmoins, après que le Prophète l’eût condamné au châtiment prescrit, il ne chercha pas à lui nuire davantage, car il savait qu’il aurait alors aidé le diable contre cet homme. Il s’efforça plutôt d’attirer l’attention des autres sur les qualités d’Abdallah.
Cette histoire devrait nous amener à réfléchir à notre attitude envers les autres. Il nous arrive trop souvent de traiter les autres durement et injustement, simplement parce que nous sommes en désaccord avec eux, alors que leurs péchés, ou péchés présumés, sont bien moins graves que ceux d’Abdallah. Parfois, les « péchés » des autres relèvent seulement de notre opinion personnelle – alors que la chose disputée est sujette à interprétation – et pourtant, nous n’hésitons pas un instant à attaquer nos adversaires de façon virulente, usant de tout notre arsenal verbal. Combien cette attitude est éloignée de celle du Prophète qui, devant une personne ayant commis un péché évident, trouvait encore de bonnes choses à dire à son sujet, tout en maintenant des relations cordiales avec elle.
L’attitude du Prophète envers Abdallah est un excellent exemple, pour nous, non seulement de la façon dont nous devrions nous traiter les uns les autres, mais de la façon dont la société peut arriver à créer des liens sociaux forts qui peuvent dissuader des gens de sombrer dans le péché.