L’idolâtrie (partie 5 de 5)
Description: Comment l’idolâtrie s’est introduite au sein du christianisme. Partie 5 : quelques questions qui invitent à la réflexion.
- par Laurence B. Brown, MD
- Publié le 08 Feb 2016
- Dernière mise à jour le 08 Feb 2016
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Un défi percutant à la pensée trinitaire, initialement attribué à Theophilus Lindsey (1723–1804) et plus tard défendu par des chrétiens unitariens à travers le monde, demande à ceux qui adorent Jésus comment ils répondraient si ce dernier revenait sur terre et leur posait ces questions :
a) Pourquoi m’avez-vous adressé vos prières? Vous ai-je jamais dit de le faire ou me suis-je moi-même offert en objet d’adoration?
b) Ne vous ai-je pas, du début à la fin de ma mission et de manière constante, donné l’exemple en adressant mes prières exclusivement au Père, mon Père et le vôtre, mon Dieu et le vôtre? (Jean 20:17)
c) Quand mes disciples m’ont demandé de leur apprendre à prier (Luc 11:1-2), leur ai-je enseigné à m’adresser leurs prières? Ne leur ai-je pas enseigné à ne prier personne d’autre que le Père?
d) Ai-je jamais référé à moi-même en tant que Dieu ou dit que j’étais le créateur de l’univers et demandé à être adoré?
e) Salomon, après avoir érigé le temple, dit : « Mais est-ce qu'en vérité Dieu habiterait sur la terre, alors que le ciel dans toute son immensité ne saurait le contenir? Combien moins ce Temple que je viens de construire! » (1 Rois 8:27). Alors comment Dieu aurait-Il pu jamais habiter sur terre?
Ces questions sont très pertinentes, car les chrétiens s’attendent à ce que Jésus, lorsqu’il reviendra, reproche à de nombreux « chrétiens » d’être mécréants. Comme il est écrit dans Matthieu 7:21-23 :
« Pour entrer dans le royaume des cieux, il ne suffit pas de me dire: « Seigneur! Seigneur!» Il faut accomplir la volonté de mon Père céleste. Au jour du jugement, nombreux sont ceux qui me diront: « Seigneur! Seigneur! Nous avons prophétisé en ton nom, nous avons chassé des démons en ton nom, nous avons fait beaucoup de miracles en ton nom. » Je leur déclarerai alors: « Je ne vous ai jamais connus! Allez-vous-en, vous qui pratiquez le mal! »
Alors si Jésus reniera certains chrétiens pour avoir prophétisé, exorcisé et accompli des « miracles » en son nom (i.e. ceux qui disent « Seigneur! Seigneur! »), qui seront exactement ces mécréants?
Réponse : ceux qui « pratiquent le mal » (les paroles de Jésus et non les miennes). Car, je vous le demande, quelle loi Jésus a-t-il enseignée? Au cours de sa mission, « la volonté de mon Père au ciel » était la loi de l’Ancien Testament. Voilà ce qu’a enseigné Jésus et c’est ce à quoi il se conformait au jour le jour.
Alors où, dans ses enseignements ou dans son exemple, Jésus a-t-il enjoint ses fidèles de lui adresser leurs prières et à se soumettre à lui? Nulle part! Au contraire, la Bible reproduit ces paroles venant de lui : « Jésus lui répondit: « Il est écrit: « Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et c'est à lui seul que tu rendras un culte. » (Luc 4:8). « Pourquoi m'appelles-tu bon? lui répondit Jésus. Personne n'est bon, sinon Dieu seul. » (Matthieu 9:17, Marc 10:18, et Luc 18:19) et « Si vous m'aimiez, vous seriez heureux de savoir que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi. » (Jean 14:28)
C’est peut-être pour ces raisons que les chrétiens adressèrent, durant plus de 1800 ans, leurs prières au Père et seulement au Père. Comme le souligne Joseph Priestly, prier Jésus est une innovation moderne, éloignée des enseignements de Jésus et de la façon de faire durant des siècles :
« Par conséquent, la pratique consistant à adresser ses prières au Père exclusivement fut longtemps appliquée dans les églises chrétiennes; les brèves formules s’adressant directement au Christ, comme dans la litanie « Seigneur ait pitié de nous, Christ ait pitié de nous » ne sont venues que plus tard. Dans la liturgie clémentine, qui est la plus ancienne (quatrième siècle), il n’y a aucune trace de prières adressées à autres que Dieu. Origène, dans un traité volumineux sur le sujet de la prière, exhorte avec vigueur à prier au Père seulement et non au Christ; et comme il ne laisse aucunement entendre qu’il y avait quoi que ce soit de répréhensible dans les prières publiques, on ne peut que conclure qu’à son époque, les invocations au Christ étaient inexistantes dans les assemblées publiques chrétiennes. Ainsi, à l’exception des Moraves, dont les prières s’adressent toujours au Christ, la pratique générale et universelle des trinitaires, jusqu’à récemment, était de prier le Père uniquement.
Maintenant, sur quel principe cette pratique universelle, appliquée depuis le tout début, était-elle fondée? Qu’y a-t-il, dans la doctrine d’une trinité constituée de trois personnes égales, qui fasse mériter au Père cette distinction Le plaçant au-dessus du Fils et du Saint-Esprit?[1]
Qu’y a-t-il, en effet? Priestly rappelle un aspect peu connu de l’histoire chrétienne, à savoir que jusqu’à son époque (i.e. vers la fin du 18e siècle), « la pratique générale des trinitaires était de prier le Père uniquement ». Ceux qui se basent sur leur expérience chrétienne moderne peuvent croire, à tort, que la pratique du 21e siècle consistant à prier Jésus remonte aux premiers temps du christianisme.
Rien n’est plus éloigné de la vérité.
Durant près de 1800 ans suivant la naissance du christianisme, les prières furent adressées directement à Dieu. Ce n’est qu’en 1787, quand l’église morave, une secte protestante fondée dans la Bohème (aujourd’hui République Tchèque) du 15e siècle, subit une transformation pentecôtiste en profondeur et qu’elle se mit à adresser ses prières directement à Jésus que le phénomène commença à se répandre.
Alors pourquoi, si les trois personnes de la trinité sont considérées comme égales, une telle préférence pour le Père a-t-elle prévalu pendant si longtemps (durant les 1800 premières années du christianisme, plus exactement)? Il y a, certes, une plus grande leçon à tirer de l’uniformité des dévotions chrétiennes des dix-huit premiers siècles du christianisme que des incohérences de la théologie trinitaire.
Priestley n’est qu’un des nombreux lucides qui ont tenté de prévenir le déraillement des dévotions chrétiennes du Créateur à Sa création – Jésus, Marie, le Saint Esprit et la multitude de saints. Mais aucune analyse historique de ce sujet ne serait complète sans souligner que l’islam a toujours respecté un strict monothéisme, tel que le décrit Gibbon :
« Les Mahométans ont uniformément résisté à la tentation de réduire l’objet de leur foi et leur dévotion au niveau de leur raison et de leur imagination. « Je crois en un seul Dieu et en Mahomet, le prophète de Dieu »[2] est la seule et invariable profession de l’islam. L’image intellectuelle de la Déité n’a jamais été avilie par aucune idole visible; les honneurs du prophète n’ont jamais dépassé la mesure de la vertu humaine; et ses préceptes vivants ont restreint la gratitude de ses disciples dans les limites de la raison et de la religion. »[3]
Note de bas de page:
[1] Priestley, Joseph. 1786. The Theological and Miscellaneous Works of Joseph Priestley. Édité par John Towill Rutt. Hackney: George Smallfield. Vol VI, p. 29.
[2] IslamReligion.com: Meaning Muhammad (in Medieval Latin, Polish, or French) [Source: http://en.wikipedia.org/wiki/Mahomet]
[3]Gibbon, Edward, Esq. Vol. 5, Chapter L, p. 533.
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