Réflexions philosophiques (partie 1 de 5)
Description: Cette série d’articles procure un cadre conceptuel qui répond aux « grandes questions » sur notre existence. La partie 1 aborde la notion du besoin de chercher la vérité.
- par Hamza Andreas Tzortzis
- Publié le 24 Oct 2016
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Ces réflexions philosophiques touchent à divers sujets dont la vérité, le succès, la raison d’être de notre existence, la mort, la pensée et la vision du monde. J’ai délibérément conclu avec des questions plutôt qu’avec des réponses, car je souhaitais fournir un cadre conceptuel aux lecteurs qui ne partagent peut-être pas mes vues et qui voudraient trouver des réponses par eux-mêmes. J'ai inclus des versets coraniques pertinents afin de stimuler la réflexion, une approche que l'on retrouve dans le Coran même, qui demande fréquemment: « Ne réfléchissez-vous donc pas? ».
Il y a un proverbe africain qui dit: Celui qui
pose des questions ne peut éviter les réponses. J'espère donc que ces
réflexions faciliteront la quête de vérité chez ceux qui la cherchent.
La vérité
« C’est la vérité venant de ton Seigneur, (ô Mohammed) : ne sois donc pas de ceux qui doutent. » (Coran 2: 147)
« Ne mêlez pas la vérité au mensonge et ne cachez pas sciemment la vérité. » (Coran 2: 42)
La question de la vérité a troublé l'esprit de pratiquement chaque être humain ayant vécu sur cette planète. Qu'est-ce que la vérité? Comment la trouver? Existe-t-elle vraiment? Ces questions remontent aussi loin qu'aux philosophes grecs tels Socrate qui, tout jeune, posait déjà de nombreuses questions et cherchait la vérité. De nos jours, toutefois, moins nombreuses sont les personnes s'interrogeant réellement sur la vérité avec un grand V, i.e. le pourquoi de notre existence, ce que ça signifie d'être un être humain. Souvent, plutôt que de chercher la vérité, elles adoptent le scepticisme comme philosophie.
Les sceptiques répondent par la négative à la question suivante: nous est-il possible de savoir quoi que ce soit? Ils laissent ainsi entendre que la vérité sur la vie et la réalité de l'univers ne sera jamais connue. Fondé par Pyrrhon d'Élie, le scepticisme fut prôné et mis par écrit par le philosophe grec Sextus Empiricus, qui fut le premier à détailler et codifier la doctrine. Cette école philosophique est répandue, de nos jours, bien que son approche vis-à-vis de la vérité soit injustifiée, car il a été démontré que l'on peut bel et bien trouver la vérité et que la seule façon d'y parvenir est en posant inlassablement des questions. Socrate était connu pour savoir interroger ses interlocuteurs et les amener, ainsi, à découvrir eux-mêmes la vérité, car il croyait que la vérité se trouve en chacun de nous. Par exemple, il existe de nombreux principes universels indéniables; les nier reviendrait à nier le savoir lui-même. Prenez, à titre d'exemple, deux planches de bois de longueur identique: savons-nous qu'elles sont égales parce qu'elles sont de la même longueur ou connaissions-nous le concept d'égalité avant d'avoir vu ces planches? C'est parce que nous avons, en nous, le concept inné d'égalité que celui-ci nous permet de comprendre que les planches de bois sont de la même longueur. Nous savons également que la moitié d'une chose est moindre que son tout et nous savons, par exemple, que tous les pères sont des hommes. Ces concepts innés sont connus, en épistémologie, comme des à priori, i.e. une connaissance indépendante de l'expérience.
D'un point de vue pratique, la position du sceptique est indéfendable, car nous connaissons la vérité des lois de la physique qui permettent aux ponts de soutenir de lourdes charges, de même que des lois qui font en sorte que les paquebots flottent. Si nous adoptions la position du sceptique avant de construire nos maisons, accepterions-nous d'aller de l'avant avec la construction? Le philosophe polonais Leszek Kolakowski écrit:
« Nous pourrions dire: Si nous ne savons rien, à quoi bon échafauder des théories qui n'ont aucun fondement? Mais si les philosophes et les érudits avaient sérieusement tenté d'atteindre une telle sérénité autosatisfaisante, auraient-ils été en mesure de bâtir notre civilisation? La physique moderne aurait-elle été inventée? »
Il y a donc des vérités universelles que nous pouvons accepter avec certitude et la façon de découvrir de nouvelles vérités est d'utiliser ces vérités universelles comme point de départ, ce qu'on appelle le fondationnalisme épistémique dans le langage philosophique.
L’importance de la vérité a été soulignée par de nombreux penseurs, passés et présents. Platon a dit : « N’est-ce pas une mauvaise chose que d’être trompé au sujet de la vérité et une bonne chose que de connaître cette dernière? Car je présume que par « connaître la vérité », vous voulez dire connaître les choses telles qu’elles sont. » Pourquoi la quête de vérité est-elle aussi importante? La vérité n’est pas qu’intuitive; elle nous donne une impression de réalité, nous fait sentir que les choses sont vraies. En l’absence de vérité, la vie peut parfois nous sembler irréelle et illusoire. De plus, de nombreux psychologues ont reconnu le fait que l’être humain aime sentir qu’il a raison et cherche à apprendre à partir des normes sociales lorsqu’il se sent incertain. Ce processus psychologique est connu sous le terme de « Influence sociale normative et informationnelle ». La quête de vérité est très importante, car elle apporte à l’individu la possibilité de façonner la personne qu’il est ou la personne qu’il souhaiterait être.
Une autre façon de voir cela est que s’interdire de chercher la vérité revient à se mentir à soi-même ou à accepter un mensonge, car tout ce qui est autre que la vérité est nécessairement un mensonge. Alors une quête de vérité est un moyen de tenter d’être plus sincère avec soi-même, car il s’agit de tenter d’établir la vérité sur ce que nous sommes et sur notre existence sur cette terre. Enfin, s’agripper au point de vue sceptique selon lequel il n’existe pas de vérité est une attitude défaitiste. L’affirmation selon laquelle il n’existe pas de vérité est en fait une proclamation de vérité; comment peut-on prétendre que le scepticisme est vrai et que tout le reste est faux? Telle est l’incohérence du discours sceptique : le sceptique prétend avoir raison, mais nie toutes les autres vérités. Par conséquent, peu importe quelle position nous adoptons, nous finissons toujours par accepter une vérité.
Réflexions philosophiques (partie 2 de 5)
Description: Cette série d’articles procure un cadre conceptuel qui répond aux « grandes questions » sur notre existence. La partie 2 nous amène à réfléchir sur ce qu’est le succès et sur la raison d’être de notre existence.
- par Hamza Andreas Tzortzis
- Publié le 24 Oct 2016
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Le succès
« …ceux-là réussiront. » (Coran 7:157)
« C’est cela, certes, le triomphe suprême. » (Coran 37:60)
Une des meilleures définitions du succès que j’aie vues est : « La réalisation des intentions ». Par exemple, si j’ai l’intention d’apprendre à conduire et que je réussis l’examen de conduite, c’est un succès. En tant qu’humains, nous avons constamment des intentions : obtenir une promotion, devenir notre propre patron, être un bon père, une bonne mère, un bon mari, une bonne épouse, voyager dans le monde, écrire un livre, etc. Si nous atteignons les objectifs que nous nous étions fixés, nous considérons avoir réussi. Mais cette vision du succès est-elle importante?
Si nous vivons notre vie dans l’espoir d’atteindre nos objectifs, sans jamais nous questionner sur la raison d’être de notre existence, alors notre vie n’aura jamais de sens. Notre vision du succès est alors sans fondement et dépourvue de valeur réelle. Si une personne vit ainsi, elle ne peut atteindre l’objectif réel de son existence et ne peut donc atteindre le succès. On peut même se demander si sa vie aura valu la peine d’être vécue. Sa vie aura peut-être eu de l’importance vis-à-vis ces choses qu’elle souhaitait accomplir, mais sans plus.
Voyons la chose d’un point de vue scientifique: nos enfants, nos actions, les gens que nous aimons et tout ce que nous faisons ne sont que des agencements de molécules. Du carbone et divers atomes en combinaisons variées forment nos vies et même ces choses que nous avons l’intention de réaliser. Strictement de ce point de vue, l’humanité n’a guère plus d’importance qu’une nuée de mouches ou un troupeau de moutons, car leur composition est la même. Aussi, si nous suivons la ligne de pensée scientifique, notre mort est elle aussi insignifiante : nous mourons et puis c’est tout. La contribution des scientifiques à l’avancée de la pensée humaine, les recherches constantes pour trouver un remède au cancer, les efforts du système judiciaire pour établir la justice et la paix, tout cela n’a pas de réelle signification. Même si les êtres humains devaient exister pour toujours et sans interruption, cette éternité ne donnerait pas plus de sens à nos vies, car elles n’auraient toujours pas de véritable raison d’être.
Les existentialistes tels Sartre et Camus comprenaient l’insignifiance de la vie lorsque les gens refusent de reconnaître que leur existence a une raison d’être. C’est pourquoi Sartre a écrit sur la « nausée » de l’existence et que Camus voyait la vie comme une chose absurde, laissant ainsi entendre que l’univers n’avait aucune signification. Le philosophe allemand Nietzsche a affirmé en termes non équivoques que le monde et l’humanité n’avaient aucune signification ni aucune raison d’être rationnelle. Selon lui, rien d’autre n’existait qu’un chaos abrutissant, sans direction ni objectif.
Si nous trouvions la raison d’être de notre existence et donnions ainsi à notre vie une signification réelle, et si nous réalisions cet objectif – tel serait le véritable succès. Certains pourraient soutenir que cette discussion prend pour acquis, au départ, qu’il existe une sorte d’entité métaphysique qui a créé l’univers dans un but quelconque. C’est pourtant vrai. Car si nous faisons fi de cette réalité, nous ne pouvons que présumer que l’athéisme est dans le vrai. N’oublions pas que la conclusion logique de l’athéisme est que notre existence n’a aucune signification, conclusion qui met mal à l’aise plusieurs athées dans la mesure où elle va à l’encontre de notre nature innée et de nos dispositions psychologiques. Alors les questions suivantes s’imposent : quelle est la raison d’être de notre existence et quelle vision donnerait un sens à notre quête de succès?
Objectif
« Où donc allez-vous? » (Coran 81:26)
« Seigneur! Tu n’as pas créé tout cela en vain. » (Coran 3:190)
« Dieu n’a créé (tout) cela qu’en toute vérité. Il expose (en détail) les révélations pour les gens qui comprennent. » (Coran 10:5)
Le philosophe australien Ludwig Wittgenstein, qui a inspiré deux des principaux mouvements philosophiques du 20e siècle, a dit : « Je ne sais pas pourquoi nous sommes ici, mais je suis certain que ce n’est pas pour nous amuser. » Wittgenstein n’a pas trouvé la réponse à la raison d’être de notre existence, mais il a clairement laissé entendre qu’il y avait forcément une raison d’être à notre présence sur cette terre, même si elle ne pouvait être découverte de manière intuitive. Certains avanceront, toutefois, que l’hypothèse selon laquelle nous existons pour une raison est fausse et que si elle est fausse, alors nous n’avons pas à nous casser la tête et nous pouvons continuer à vivre librement et avec insouciance. Comme Albert Camus l’a expliqué : « Vous ne vivrez jamais si vous persistez à chercher un sens à la vie. » Le point de vue de Camus n’est pas ontologique; son souci semble surtout existentiel. Selon lui, le plus important est le sens que vous donnez à votre propre vie, indépendamment de l’existence (ou non) d’une vérité fondamentale. Ainsi, à la lumière de tout cela, nous pouvons nous demander : est-il raisonnable de croire que notre existence a une raison d’être?
Pour répondre à cette question, il faut prendre les points suivants en considération :
Vous lisez probablement ceci chez vous, assis sur une chaise et vêtus. Je vous pose alors la question : pour quelle raison? Pourquoi êtes-vous vêtus et pourquoi êtes-vous assis sur une chaise? Comme il s’agit de questions rhétoriques, vous n’avez pas à y répondre, car nous connaissons tous les réponses. La chaise est là pour vous permettre de vous asseoir en supportant votre poids et vos vêtements vous préservent des éléments, masquent votre nudité et vous permettent d’avoir meilleure allure que nu. Maintenant, laissez-moi vous transporter dans une forêt, quelque part dans le monde; sur un arbre, il y a un papillon de nuit. Ce papillon boit la sève de l’arbre et, sous lui, se trouve un autre papillon identique dont le rôle est assez étrange : il boit les excréments du premier papillon. Pourquoi? Parce que le premier papillon élimine quasi instantanément ses excréments au fur et à mesure qu’il boit la sève. Vous vous demandez sûrement où je veux en venir avec tout cela. C’est que le rôle du deuxième papillon est d’empêcher les excréments du premier de se déposer sur l’écorce de l’arbre pour ne pas que les fourmis, entre autres, montent sur l’écorce, attirées par l’odeur, et mangent le premier papillon. En termes simple, le deuxième papillon constitue l’assurance-vie du premier!
Vous ne saviez probablement rien de ce papillon de nuit avant de me lire et même si une maladie éradiquait les papillons de nuit, cela ne vous inquièterait pas outre mesure – enfin, la plupart d’entre vous ne s’en inquièteraient pas. Mais vous attribuez maintenant une raison d’être à cette créature insignifiante, comme vous attribuez une raison d’être à vos vêtements et à votre chaise, qui sont des objets inanimés et qui ne possèdent aucune faculté mentale ou émotionnelle. Et pourtant, vous refusez d’attribuer une raison d’être à votre propre existence. N’est-ce pas absurde?
Réflexions philosophiques (partie 3 de 5)
Description: Cette série d’articles procure un cadre conceptuel qui répond aux « grandes questions » sur notre existence. La partie 3 poursuit la discussion à savoir s’il y a une raison d’être à notre existence.
- par Hamza Andreas Tzortzis
- Publié le 31 Oct 2016
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Croire que notre existence n’a aucune raison d’être est non seulement irrationnel, mais également problématique, car cela signifie que les grandes réalisations des êtres humains auraient été totalement vaines. Les gens qui ont accompli ces grandes choses (comme la découverte de la pénicilline) avaient forcément une vision positive de la vie et une approche motivée par un objectif à atteindre. Sans ce genre de motivation, nous serions comme des animaux vivant selon nos instincts. La réalité d’une existence dénuée de raison d’être fut également soulignée par le philosophe Arthur Schopenhauer, qui prétendait que le monde est en faillite et qu’il n’y a aucune raison de se réjouir de son existence. Il avançait même qu’il serait préférable qu’il n’existe pas et se demandait si le suicide ne serait pas, tout compte fait, la meilleure solution.
Alors pourquoi est-ce irrationnel? C’est irrationnel parce que si toutes les choses complexes et parfaitement conçues, autour de nous, semblent avoir une raison d’être (incluant un insignifiant papillon de nuit), notre existence doit elle aussi, logiquement, avoir une raison d’être. Nier cela revient à croire à des choses sans aucune preuve, car il n’existe pas de preuve démontrant que notre existence est sans raison d’être (mais il en existe démontrant le contraire). Même les scientifiques affirment qu’il est irrationnel d’affirmer que notre univers est impersonnel et le simple produit du hasard. Ils ont d’ailleurs démontré que les processus physiques, dans l’univers, ont bel et bien une raison d’être. L’astronome Fred Hoyle, entre autres, a décrit l’univers en utilisant les attributs de Dieu et les physiciens Zeldovich et Novikov se sont demandé pourquoi la nature avait choisi de créer cet univers plutôt qu’un autre.
Enfin, nous pouvons soutenir que, sans raison d’être, notre vie ne peut avoir de sens profond. Par exemple, si nous adoptons la conclusion logique d’un point de vue scientifique apathique sur notre existence, nous sommes alors sur un bateau qui prend l’eau. Ce bateau s’appelle l’univers, car selon les scientifiques, l’univers mourra de chaleur intense puisqu’un jour, le soleil détruira la terre. Alors si ce bateau finira par couler, pourquoi continuer à vivre? Comme le disait l’écrivain et essayiste russe Fyodor Dostoyevsky : « Sans objectif et sans efforts pour l’atteindre, nul ne peut vivre. »
Plusieurs affirmations peuvent découler de cette discussion. Tout d’abord, l’idée d’un monde sans raison d’être nous donne plus de liberté pour nous créer nous-mêmes un objectif. Certains existentialistes ont avancé que notre vie n’est fondée sur rien et qu’à partir de ce néant, nous pouvons créer de nouvelles possibilités et donc de nouveau objectifs. Cette philosophie repose sur l’idée selon laquelle rien n’a de sens et que nous devrions nous créer une nouvelle vision de la vie afin de nous épanouir. Le problème avec cette approche, c’est qu’elle utilise un sens pour prétendre à l’absence de sens. Elle représente également l’aveuglement, car elle nie toute raison d’être, mais propose d’en créer une soi-même. De plus, elle implique l’absence de valeurs et de vérités morales objectives, car il n’y a aucun fondement ontologique. Cela défie toute logique et va à l’encontre du consensus interculturel de notre pensée morale. La philosophie de la guerre est un bon exemple pour démontrer ce type de consensus moral. Durant plus de 2500 ans, il existait un consensus selon lequel les poisons ne devaient pas être utilisés, même si la défaite était imminente. Même si, en pratique, les gens ne s’y conformaient pas toujours, ils étaient du moins d’accord avec cette règle.
Une autre affirmation inclut le point de vue évolutionniste selon lequel la raison d’être de notre vie est de propager notre ADN, tel que le mentionne Richard Dawkins dans son ouvrage intitulé « The Selfish Gene » (Le gène égoïste). Il y affirme que nos corps ne se sont développés que pour cette raison. Le problème, avec cette analyse, c’est qu’elle relègue notre existence à un pur hasard découlant d’un long processus biologique. Autrement dit, la valeur de notre vie perd son sens et la moralité est reléguée à des choix individuels. Comme l’affirme le philosophe des sciences Michael Ruse :
« La moralité est une adaptation biologique au même titre que les mains, les pieds, les dents… La moralité n’existe que pour nous aider à survivre et à nous reproduire et tout sens plus profond est totalement illusoire. »
La perspective évolutionniste crée plus de problèmes qu’elle n’en résout, car elle n’arrive pas à fournir une explication adéquate pour la conscience et la présence de nos facultés rationnelles. En ce qui concerne la conscience, comment cette réalité immatérielle subjective peut-elle provenir d’une substance matérielle? La conscience n’est pas une chose physique; elle n’est contenue dans aucune cellule ou structure biologique. La réalité la plus incontestée est que nous sommes tous conscients, mais que nous n’arrivons pas à décrire ou expliquer ce qu’est la conscience. La chose au sujet de laquelle nous avons une certitude est que la conscience ne peut être expliquée de façon biologique ou chimique et que l’évolution ne fait aucune découverte sur la conscience : c’est plutôt le contraire. Que l’évolution tente d’expliquer la réalité de la conscience revient à tourner en rond infiniment. Même les scientifiques reconnaissent cette réalité; le physicien Gerald Shroeder souligne qu’il n’y a pas de réelle différence entre un amas de sable et le cerveau d’Einstein. Si certains préfèrent donner une explication physique à la conscience, de plus grandes questions auront besoin de réponses, telles : « Comment certaines parties de la matière peuvent-elles soudainement créer une nouvelle réalité ne ressemblant en rien à cette matière? ».
Alors si la conscience ne peut être expliquée physiquement, on doit se demander : « Comment est-elle apparue? ». L’histoire de l’univers indique que la conscience est apparue spontanément et que le langage est apparu sans signe précurseur. Même les néo-athées ne sont pas parvenus à un consensus sur la nature et la source de la conscience, car aucune explication physique n’est suffisamment cohérente pour arriver à convaincre. Même Richard Dawkins admet : « Nous ne savons pas. Nous n’arrivons pas à comprendre [la conscience]. »
En conclusion, il y a plus de raisons de croire que notre existence a une raison d’être profonde que de croire aux autres suggestions formulées par les évolutionnistes. Même le philosophe écossais David Hume a dit : « L’homme sage adapte ses croyances aux preuves. » Alors dans ce cas-ci, il serait plus sage de conclure que l’être humain a une raison d’être. Mais quelle est cette raison d’être?
Réflexions philosophiques (partie 4 de 5)
Description: Cette série d’articles procure un cadre conceptuel qui répond aux « grandes questions » sur notre existence. La partie 4 nous rappelle que penser à la mort est l’élément moteur nous poussant à réfléchir aux questions essentielles.
- par HamzaAndreas Tzortzis
- Publié le 31 Oct 2016
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La mort
« Toute âme doit goûter la mort. » (Coran 21:35)
« Où que vous soyez, la mort s’abattra sur vous. » (Coran 4:78)
La mort est une chose à laquelle personne n’aime penser. Y penser nous rappelle que tout ce à quoi nous nous sommes attachés, en ce monde, finira par disparaître et cela nous met devant la brutale réalité que nous disparaîtrons également à notre tour. Il y a eu de nombreuses pensées philosophiques sur la mort; des penseurs l’ont vue comme une interruption de la vie, comme un sommeil et, même, comme une maladie permanente. D’autres ont expliqué que la mort doit être considérée comme faisant partie de la vie, une chose que chaque personne doit finir par accepter si elle veut vivre sereinement. D’autres, enfin, ont affirmé que la mort doit être considérée comme une transition de la vie sur terre à un au-delà où se trouvera une vie éternelle de félicité ou de douleur.
Quel que soit notre point de vue sur la mort, nous devrions être d’accord pour affirmer que nous n’y pensons pas assez souvent. Cela peut sembler morbide, mais il est bon de méditer sur la mort; notre petite personne nous semble tout à coup moins importante, notre attachement et nos désirs liés aux choses matérielles sont mis en perspective et notre mode de vie est remis en question. Cela ne peut nous être que bénéfique. Al-Ghazali, philosophe et théologien du 11e siècle, a dit : « Dans le rappel de la mort, il y a un mérite. » Méditer sur la mort nous permet de réfléchir sur la nature très éphémère de notre existence.
Qu’est-ce que la mort nous dit sur l’importance que nous attachons aux choses qui nous entourent et de quelle façon donne-t-elle un sens à notre existence? Si nous regardons la vie à travers les lentilles de la mort, nous nous retrouvons dans un espace émotionnel et intellectuel où nous pouvons plus aisément évaluer notre situation sur terre. Comment sommes-nous arrivés ici? Que sommes-nous venus faire ici? Où irons-nous par la suite? C’est la pensée de la mort qui nous incite à nous poser ces questions fondamentales, car à partir du moment où nous reconnaissons que la vie est courte et que notre cœur cessera de battre, un jour, il nous est plus facile de mettre les choses en perspective.
Alors méditons sur la mort; imaginez qu’une minute, vous êtes ici et que la minute suivante, vous trépassez. Vous avez sans doute connu des personnes chères qui sont maintenant décédées; comment vous êtes-vous sentis à leur mort? N’avez-vous pas ressenti un grand vide et une sorte d’indifférence soudaine envers les choses auxquelles vous teniez? Et si vous deviez mourir maintenant, qu’est-ce que cela signifierait pour vous? Si vous aviez la chance de revenir en arrière, que feriez-vous différemment? Que prendriez-vous plus au sérieux? Et si vous aviez la chance de revivre votre vie après avoir connu la mort, la revivriez-vous de la même façon?
Ce qu’il y a de triste, avec la mort, est que nous ne pouvons revenir en arrière et changer ce que nous avons fait. Mais il n’est pas trop tard pour s’arrêter et réfléchir sérieusement à la mort afin d’apporter des changements immédiats à notre façon de vivre.
Réfléchir
« Ainsi exposons-Nous les révélations aux gens qui réfléchissent. » (Coran 10:24)
« Et Il apprit à Adam les noms (de toutes choses)… » (Coran 2:31)
« La demeure de l’au-delà est bien meilleure pour ceux qui se dévouent à Dieu. Ne comprenez-vous pas? » (Coran 6:32)
« Ne méditent-ils pas en eux-mêmes ? » (Coran 30:8)
Comment comprendre le monde autour de nous? Quelles méthodes devrions-nous utiliser pour atteindre une réelle compréhension du monde qui nous entoure? Ces questions ont travaillé l’esprit de nombreux grands penseurs à travers l’histoire. L’histoire humaine est jalonnée de débats et de discussions sur ce thème. Locke, Hume, Kant et tous les autres comme eux ont tenté d’apporter des réponses à ces questions. Certains de ces penseurs, comme Locke, affirmèrent que notre connaissance du monde se limite à nos perceptions, i.e. que le savoir dépend de nos expériences sensorielles, ce qui est connu sous le nom de posteriori en épistémologie et qui constitue la tradition empirique en philosophie.
Locke affirma que notre esprit est comme une page blanche, une tabula rasak, qui attend que nos expériences y soient inscrites. D’autres penseurs, tels Leibniz, avancèrent qu’en tant qu’êtres humains, nous possédons des concepts et des idées innés qui nous sont nécessaires pour comprendre le monde qui nous entoure, ce qui est connu sous le nom d’à priori en philosophie. Cela signifie que le savoir peut s’acquérir indépendamment des expériences sensorielles et c’est ce qui forme la tradition rationaliste en philosophie. Le point de vue de Leibniz semble plus convaincant et logique, mais certains philosophes et scientifiques le réfutent et affirment que nous sommes incapables d’imaginer des choses indépendamment de notre expérience sensorielle. Cela est pourtant faux. Considérez les exemples suivants :
·Les cercles n’ont pas de coins
·4+4 = 8
·Le temps est irréversible
·Tout ce qui existe a une cause
·Le tout est plus grand que la moitié
·La causalité
Prenons la causalité comme exemple pour illustrer le fait que nous ne pouvons nous fier uniquement aux expériences sensorielles. La causalité peut être comprise sans expérience particulière, car nous l’incluons dans nos expériences. C’est comme porter des lunettes à verres teintés jaune; tout ce que nous regardons est jaune, non pas parce que les objets sont jaunes, mais parce que les verres le sont. L’affirmation selon laquelle il ne s’agit là que d’une hypothèse est fausse, car sans causalité, nous serions incapables de développer le concept du monde réel et nous n’arriverions pas à comprendre nos expériences sensorielles. Imaginez que vous êtes en train de regarder la Maison Blanche, à Washington. Vos yeux se déplacent peut-être de la porte aux piliers, puis du toit à la pelouse, devant. Opposez cela à une autre expérience : vous êtes sur la Tamise, à Londres, et un bateau passe devant vous. Qu’est-ce qui dicte l’ordre dans lequel vous détaillez les choses avec vos yeux? Quand vous étiez devant la Maison Blanche, vous aviez le choix de regarder d’abord la porte, puis les piliers, etc. Mais en ce qui concerne le bateau, vous n’aviez pas de choix, car c’est l’avant du bateau qui est apparu en premier devant vos yeux.
Le point, ici, est que vous n’auriez pas été en mesure de faire la distinction entre les expériences provenant de vous-mêmes et les expériences indépendantes, à moins d’avoir une idée innée de la causalité. En l’absence de causalité, nos expériences seraient très différentes; elles seraient une séquence unique d’expériences successives.
Il semble donc que la bonne façon de tirer des conclusions est d’utiliser nos idées innées et les expériences du monde qui nous entoure; autrement dit, utiliser la pensée rationnelle, ou ce que certains appellent la raison. Se fier uniquement à notre expérience du monde matériel n’est pas une méthode suffisante, car on ne peut, de cette façon, confirmer les vérités politiques, morales, mathématiques et logiques, en plus de la vérité fondamentale de la causalité.
Réflexions philosophiques (partie 5 de 5)
Description: Cette série d’articles procure un cadre conceptuel qui répond aux « grandes questions » sur notre existence. La partie 5 poursuit la même discussion que dans la quatrième partie et explique que les fondements intellectuels de n’importe quelle vision du monde devraient être évalués afin d’établir leur validité.
- par Hamza Andreas Tzortzis
- Publié le 03 Sep 2018
- Dernière mise à jour le 03 Sep 2018
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Bien que nous puissions comprendre le monde autour de nous en utilisant la pensée rationnelle, comment pouvons-nous formuler un argument ou vérifier nos conclusions? Cela repose dans l’étude de la logique, en mettant l’accent sur la structure de nos arguments.
Considérez l’exemple suivant : si notre amie Marie dit : « Jean vient au dîner de ce soir » et que David dit : « Marie ne vient pas au dîner de ce soir », ce qu’ils affirment est-il cohérent? Selon la logique, s’ils font référence à la même personne, la réponse est non. Mais s’ils ne font pas référence à la même personne, alors oui, c’est cohérent.
Supposons, maintenant, que Jean dit : « Tout ce qui existe a une cause et comme l’univers existe, il a lui aussi une cause. » D’un point de vue logique, il s’agit d’un argument valide. Mais cela ne veut pas forcément dire que c’est un argument rationnel ou raisonnable. Pour affirmer qu’il est raisonnable, il nous faudrait l’étudier en utilisant nos idées innées et nos expériences sensorielles. S’il l’est, la conclusion serait qu’il s’agit d’un argument valide et raisonnable.
Ne nous fier qu’à l’empirisme ne nous donne pas de réponses, car nous ne pouvons évaluer si l’univers a une cause ou non sans utiliser nos expériences sensorielles. Cela reviendrait à nier l’existence de notre arrière-arrière-arrière-arrière-grand-mère parce qu’il n’existe pas de preuve empirique de son existence. Vous avez peut-être envie de dire : « Mais si ce n’était d’elle, je ne serais pas ici aujourd’hui ». C’est vrai, mais en affirmant cela, vous utilisez votre pensée rationnelle pour former une conclusion par déduction.
C’est ainsi que nous devrions tous réfléchir sur la vie et l’univers; nous pourrions ainsi parvenir aux bonnes conclusions, en usant d’arguments valides.
Vision du monde
« Mais il se peut que vous détestiez une chose alors qu’elle est bonne pour vous, et il se peut que vous aimiez une chose alors qu’elle est mauvaise pour vous. Dieu sait, tandis que vous ne savez pas. » (Coran 2:216)
Vivre et laisser vivre; ne faites pas de tort aux autres et tout se passera bien. Cela a du sens, n’est-ce pas? Même au point où ça ne devrait pas être remis en question. Mais pourquoi? Pourquoi acceptons-nous systématiquement certaines idées et en rejetons-nous d’autres? Pourquoi certains points de vue nous apparaissent comme agréables et acceptables, tandis que nous sommes en désaccord avec d’autres, sans vraiment méditer sur leur sens profond?
La réponse se trouve dans le concept de vision du monde. Une vision du monde est une philosophie qui nous permet de donner un sens à notre vie et à nos expériences quotidiennes. La vision du monde que nous adoptons influence la façon dont nous traitons l’information et nous permet de comprendre la société et la place que nous y occupons. Le monde contemporain fait en sorte que nous avons de plus en plus de difficulté à composer avec les changements imprévisibles et avec la complexité de la vie. Par conséquent, le stress, l’incertitude et la frustration sont de plus en plus répandus et nos esprits sont surchargés d’informations. Une vision du monde est un cadre qui relie toutes ces choses ensemble et qui nous permet de comprendre la complexité et l’imprévisibilité de la vie; elle nous aide à prendre des décisions importantes qui influeront sur notre avenir et nous aide à avoir une meilleure vue d’ensemble.
Les visions du monde varient et peuvent être superficielles ou globales, ou se situer quelque part entre ces deux extrêmes. Une vision superficielle n’apporte qu’un cadre servant à réagir aux expériences quotidiennes, telles le travail et l’amitié. Ce type de vision se développe habituellement via nos expériences passées. Elle est problématique, car elle nous empêche de progresser en maintenant une fixation sur le passé, sans possibilité de voir le monde de manière positive ou différente. Elle est limitée, car elle n’est liée qu’aux expériences personnelles, lesquelles sont elles-mêmes limitées.
Une vision du monde globale, selon le philosophe Leo Apostel, englobe toutes les choses de la vie et inclut diverses composantes. Elle fournit un modèle en répondant à la question fondamentale « qui sommes-nous? ». De plus, elle répond aux questions « pourquoi le monde est-il tel qu’il est? » et « d’où venons-nous? ». Un autre aspect important d’une vision du monde globale est qu’elle extrapole du passé au futur pour répondre à la question « où allons-nous? ». Elle devrait également s’efforcer de répondre à la question « qu’est-ce qui est bien et qu’est-ce qui est mal? », i.e. d’inclure la moralité et l’éthique, tout en apportant un sens et une direction à nos actions et nos vies. Enfin, une vision du monde globale devrait répondre à la question « qu’est-ce qui est vrai et qu’est-ce qui est faux? », ce qui est équivalent à ce qui est appelé « épistémologie » ou « théorie du savoir » en philosophie. La réponse à cette question nous permettrait de distinguer entre ce qui est bien et ce qui ne l’est pas.
Pour toute situation, divers résultats sont possibles; ils sont dictés par la vision du monde que l’on adopte. Plutôt que de discuter des actions ou des conséquences d’une vision donnée, ce sont plutôt ses fondements qui devraient être évalués et validés. Ainsi, la vision du monde dont les fondements intellectuels sont les plus convaincants devrait être adoptée.
C’est pourquoi quand vient le moment d’étudier l’islam, notre premier souci ne devrait pas être une évaluation des droits de la femme, de l’habillement et autres sujets mis au goût du jour par les médias, car cette évaluation sera biaisée et mise à niveau avec votre vision du monde déjà existante. Ce sont les fondements intellectuels de l’islam qui devraient être évalués et s’ils sont validés, être ensuite adoptés.
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